Agence commerciale : la preuve à rude épreuve

19 mai 2017 • franchise


Dans cette affaire, la société DJ optique, spécialisée dans la vente de montures de lunettes des opticiens, avait décidé de rompre le contrat d’un de ses agents commerciaux pour faute grave. La situation était devenue intenable, l’agent ne respectait pas les conditions générales de vente, n’utilisait pas les formulaires de reprise et conservait des montures de reprises pendant des mois, ce qui occasionnait une perte de marge pour la société.  La société lui avait adressé plusieurs avertissements dont il n’avait pas tenu compte et avait fini par s’en séparer. Plutôt que de débattre sur les fautes qui lui étaient reprochées, l’agent décide de contester purement et simplement la recevabilité des preuves produites par le mandant. Contre toute attente, le Tribunal de Commerce de Dieppe puis la Cour d’Appel de Rouen donnent raison à l’agent et condamnent le mandant à lui verser douze mois de commission à titre d’indemnité. Cet arrêt est intéressant à deux niveaux : Ø  S’agissant de la preuve Tout l’enjeu du procès consistait à prouver les fautes de l’agent. C’est précisément là où la société DJ optique a échoué. La Cour d’Appel écarte les mails en l’absence d’accusé de réception. Même sort pour les attestations qui sont écartées, faute d’être dûment circonstanciées. Enfin, la Cour considère que la Société ne pouvait pas reprocher à l’agent de ne pas respecter les conditions générales dès lors que celles-ci n’étaient pas annexées au contrat. Quelles préconisations tirer de cette décision ? Tout d’abord, redoubler de vigilance en matière de preuve par voie électronique. L’agent commercial étant un mandataire civil, la preuve n’est pas libre. La prudence voudrait que le mandant aménage contractuellement ce type d’envoi ou double d’un courrier recommandé tout avertissement envoyé par mail, en l’absence d’accusé de réception. Ensuite, veiller à ce que les attestations soient toujours précises et individuelles. La multiplicité des attestations ne garantit pas leur efficacité, surtout quand elles sont reproduites à l’identique. Enfin, annexer les conditions générales de vente au contrat d’agence plutôt que de se contenter d’y faire référence. Ø  S’agissant du montant de l’indemnité La faiblesse des preuves apportées par le mandant lui coûte cher : la société DJ Optique est condamnée à verser à son ancien agent douze mois de commission alors que celui-ci n’avait que deux ans et demi d’ancienneté et ne respectait plus les termes de son contrat depuis des mois. Cet arrêt confirme une jurisprudence qui tend à limiter l’indemnité de fin de contrat à douze mois lorsque les salariés ont moins de trois ans d’ancienneté (CA Amiens 12 déc. 2013, 12/00382 notamment). CA Rouen, 16 juin 2016, RG n°14/04890