On sait que l’article L.442-6-1.5 du Code de Commerce permet d’engager la responsabilité de l’auteur d’une rupture brutale d’une relation commerciale établie sans préavis écrit en tenant compte de la durée de la relation commerciale.
La jurisprudence rappelle de façon constante qu’il doit être tenu compte pour fixer le délai de préavis de l’ancienneté de la relation commerciale.
Toutefois, dans cet arrêt rendu par la Cour de Cassation, celle-ci y a précisé que, la durée du préavis suffisant, s’appréciait ici en tenant compte notamment de l’état de dépendance économique du partenaire évinscé au moment de la notification de la rupture.
Ainsi dans cette affaire, la société MEYRIEUX avait assigné la société SAINT GOBAIN EMBALLAGES, son fournisseur, qu’il approvisionnait en bouteilles.
La société SAINT GOBAIN avait ainsi annoncé à la société MEYRIEUX la fin de leurs relations commerciales à l’issue d’un délai de 16 mois, aux motifs que la mise en place de sa nouvelle politique commerciale la conduisait à reprendre en direct la vente des bouteilles sur un certain nombres de régions, et notamment la région bordelaise.
Elle indiquait ainsi à son distributeur qu’elle assurerait à l’issue de ce délai de 16 mois, le suivi direct des clients auxquels le distributeur vendait actuellement les bouteilles dans le cadre de son activité de distribution.
La société MEYRIEUX avait donc assigné en paiement de dommages-intérêts la société SAINT-GOBAIN en se prévalant d’une rupture brutale d’une relation commerciale établie, estimant que le délai de préavis de 16 mois aurait dû être fixé à 3 ans, compte tenu de la situation de dépendance économique dans laquelle elle se trouvait et de sa difficulté pour retrouver un autre fournisseur satisfaisant ses exigences très précises sur la forme, la dimension et la teinte des bouteilles, objet du contrat.
La Cour d’Appel avait fait droit à sa demande et la société SAINT-GOBAIN s’est pourvue en cassation.
Toutefois, la Cour de Cassation rejette le pourvoi et juge que doit être pris en compte, non seulement la durée de la relation commerciale, mais aussi les autres circonstances, et notamment, l’état de dépendance économique du partenaire évinscé au moment de la notification de la rupture.
La Cour de Cassation analyse que la dépendance économique résulte notamment de la difficulté pour le distributeur d’obtenir d’autres fournisseurs de produits équivalents, dans des conditions économiques comparables.
Ainsi, l’état de dépendance économique du partenaire évinscé, au moment de la notification de la rupture, est pris en considération pour ajouter à la durée de préavis, qui ne doit pas uniquement tenir compte de la durée de la relation commerciale.
Par ailleurs, il convient de préciser que dans cet arrêt, la Cour de Cassation ajoute, qu’en cas d’insuffisance de préavis, le préjudice qui en résulte est évalué en fonction de la durée de celui-ci jugé nécessaire, sans qu’il y ait lieu de tenir compte de circonstances postérieures à la rupture.
Sont ainsi balayés tous les arguments qui pourraient faire valoir l’absence de démarches de la société évinscée pour tenter de se réorganiser.
Au contraire, une absence perceptible de diminution du chiffre d’affaires, à l’issue du préavis, pour le partenaire évincé…