Réseaux de Distribution et Internet : comment concilier restriction et liberté ?

01 mai 2017 • franchise


La libéralisation de la vente sur internet a nécessairement remis en cause le modèle traditionnel de la distribution. Ainsi, les Réseaux de distribution ont eu l’obligation d’intégrer le principe de la vente en ligne. Le principe à retenir est qu’il est interdit d’interdire. De nombreuses décisions jurisprudentielles, tant en droit français qu’en droit européen, ont eu pour effet de prohiber l’interdiction faite par le fournisseur aux distributeurs de vendre les produits sur internet. La Commission européenne mais aussi la Cour de justice, l’Autorité de la Concurrence et la Cour d’Appel de Paris ont ainsi contraint peu à peu, tant les secteurs de l’horlogerie haut de gamme (Conseil de la Concurrence, décision n°06D24, 24.07.2006 pour les montres FESTINA), de la HIFI (Conseil de la Concurrence, décision n°06D28, 05.10.2006), de la parfumerie (Cour d’Appel de Paris Pôle 5, 27.06.2012, RG 10/04245) que de la cosmétique (Cour d’Appel de Paris Pôle 5, 31.01.2013, RG 2008/23812), à intégrer la vente sur internet. Ces fournisseurs soutenaient qu’autoriser la vente sur l’Internet pouvait nuire à l’image de prestige des produits qu’ils commercialisent. Cependant, la réponse de la CJUE est sans appel, elle considère que : « l’objectif de préserver l’image de prestige ne serait constituer un objectif légitime permettant d’interdire la vente sur internet », (CJUE 13.10.2011, affaire C439/09). Le franchiseur pourra toutefois concilier cette interdiction d’interdire, en encadrant les modalités de la vente par internet. Il est ainsi autorisé à imposer une charte graphique à ses distributeurs. Il sera par ailleurs légitime à prévoir dans son contrat, les modalités d’utilisation du site internet et des produits ou services pouvant être distribués par la voie d’internet. Le franchiseur ou le fournisseur peut enfin encadrer totalement cette distribution internet, en créant lui-même le site internet avec un accès dédié à chaque distributeur ou chaque franchisé. Il aura ainsi la totale maîtrise de la façon dont la commercialisation par internet pourra avoir lieu et ainsi maîtriser l’image de son réseau. La question s’est posée alors de savoir si le franchisé, bénéficiant d’une exclusivité territoriale, peut s’opposer à la création d’un site internet par le franchiseur. Ainsi, dans une hypothèse où le franchisé bénéficiait d’une exclusivité territoriale, la Cour d’Appel de Bordeaux avait retenu la responsabilité du fournisseur pour avoir créé un site sans l’accord du franchisé (CA Bordeaux, 2ème chambre, 26.02.2003, RG n°01/04496). Cependant, la Cour de Cassation ne l’entend pas ainsi. Elle casse l’arrêt de la Cour d’Appel de Bordeaux considérant que, la création d’un site internet n’est pas assimilable à l’implantation d’un point de vente dans le secteur protégé du franchisé bénéficiant de l’exclusivité territoriale (C. Cass. Com. 14.03.2006 n°03-14.639 Bull. civ. 4). La Cour de Cassation a repris cette solution jugeant que le contrat de franchise se borne à garantir au franchisé l’exclusivité territoriale dans un secteur déterminé et que la création d’un site internet n’est pas assimilable à l’implantation d’un point de vente, dont le secteur est protégé (C. Cass. Com. 14.02.2012 n°10-30.872 ; C. Cass. Com. 10.09.2013 n°12-11.701). Le principe demeure donc celui de la  liberté de la distribution sur internet. Toutefois, afin d’éviter les litiges, mieux vaut encore que les parties aient prévu au préalable les conditions de l’utilisation de l’internet. Tout bon contrat saura donc le prévoir.