Document d'information précontractuel (DIP) : cacher ne signifie pas toujours tromper

01 mai 2017 • franchise


La société Casa pizza grill avait conclu le 16 octobre 2007 un contrat de réservation de franchise avec la société Kairlou, située en région toulousaine, et lui avait remis un premier DIP (Document d'information précontractuel) dans ce cadre. Le 13 février 2008, les deux sociétés concluent le contrat de franchise définitif et la société Casa Pizza grill remet en février 2008, le jour-même de la signature du contrat de franchise, une étude datant de janvier 2008, contenant des prévisions de résultat d’exploitation inférieures à celles communiquées dans le DIP. En 2009, la société Kairlou voit son chiffre d’affaires baisser et fait l’objet d’un redressement judiciaire en septembre 2011, avant d’être liquidée en juillet 2012. La société Kairlou assigne la société Casa pizza grill, dès septembre 2011, afin d’obtenir l’annulation du contrat de franchise pour vice du consentement. Elle accusait principalement la société Casa pizza grill de l’avoir trompée sur le marché dans le DIP, en présentant son principal concurrent comme une petite boulangerie, alors qu’il s’agissait d’une boulangerie disposant de 80 places assises, membre d’un réseau de boulangeries industrielles. Elle lui reprochait également de ne pas lui avoir signalé qu’un franchisé sur Avignon avait été placé en liquidation judiciaire un an plus tôt. Les juges décident de suivre le raisonnement de la société Kairlou et annulent le contrat en première instance. La société Kairlou se voit toutefois déboutée de ses demandes par la Cour d’appel de Montpellier, le 21 octobre 2014, puis par la Cour de cassation le 21 juin 2016. La Cour de Cassation valide l’arrêt de la Cour d’Appel, qui avait relevé que le contrat de franchise incitait la société Kairlou à soumettre l’information précontractuelle reçue à ses conseils et que la baisse du chiffre d’affaires de la société Kairlou, concomittament à l’activité concurrentielle de la boulangerie, n’était pas prévisible lors de la signature du contrat de franchise. Plus surprenant, la Cour de Cassation déclare que la société Casa pizza grill n’avait pas à indiquer que son franchisé d’Avignon avait fait l’objet d’une liquidation judiciaire un an plus tôt, dans la mesure où, cette procédure n’entraînait pas automatiquement son exclusion du réseau. Or, le décret d’application de l’article L.330-3 du Code de commerce fait obligation que soit mentionné dans le DIP le nombre d’entreprises qui, étant liées au réseau par des contrats de même nature que celui dont la conclusion est envisagée, ont cessé de faire partie du réseau au cours de l’année précédent celle de la délivrance du document. Le document doit préciser si le contrat est venu à expiration ou s’il a été résilié ou annulé. Certes en cas de liquidation judiciaire du Franchisé, il ne s’agit pas d’une exclusion du réseau stricto sensu. En revanche, la loi fait obligation d’indiquer la résiliation du contrat et son motif. En cas de liquidation judiciaire, le contrat de franchise est de facto résilié. La motivation ainsi retenue par la Cour de Cassation est assez contestable. Sans doute, aurait-il été plus opportun qu’elle retienne qu’aucun lien de causalité n’était démontré par le franchisé entre la liquidation judiciaire survenue du franchisé d’Avignon, un an plus tôt, et les propres fautes qu’il reprochait à son franchiseur. Il reste qu’il me semble dangereux de dissimuler des informations aussi substantielles dans le DIP. A bon entendeur…