Franchiseurs, fournisseurs : quand jouer les banquiers peut conduire à banquer

21 septembre 2022 • franchise

Dans un arrêt du 15 juin 2022, la Cour de cassation est revenue sur l’interdiction faite à toute personne autre qu’un établissement de crédit d’effectuer des opérations de crédit à titre habituel.

Dans un arrêt du 15 juin 2022, la Cour de cassation est revenue sur l’interdiction faite à toute personne autre qu’un établissement de crédit d’effectuer des opérations de crédit à titre habituel.


Dans un arrêt du 15 juin 2022, la Cour de cassation est revenue sur l’interdiction faite à toute personne autre qu’un établissement de crédit d’effectuer des opérations de crédit à titre habituel. En l’espèce, le fournisseur Fuchs lubrifiant France, a conclu, le 19 novembre 2012, un contrat d’approvisionnement avec la société Back to Bike, par lequel cette dernière s’est engagée auprès du fournisseur à lui acheter une certaine quantité de lubrifiants pendant cinq ans. En contrepartie, la société Fuchs lui a consenti une remise de 50 % sur ses tarifs, ainsi qu’une avance sur cette remise de 30.000 euros, amortissable par la société Back to Bike, en cinq annuités. Ensuite de la liquidation judiciaire du distributeur, la cour d’appel de Paris, puis la Cour de cassation, ont été amenées à statuer sur le montage contractuel et la validité de l’avance consentie par le fournisseur à son distributeur. Or, l’article L511-5 du Code monétaire et financier dispose qu’« il est interdit à toute personne autre qu'un établissement de crédit ou une société de financement d'effectuer des opérations de crédit à titre habituel ». La société Fuchs soutenait que le crédit-fournisseur qu’elle avait concédé à sa cliente ne devait pas être considéré comme un prêt bancaire, car il ne s’agissait pas d’une opération financière, mais d’une contrepartie contractuelle accordée à la société Back to Bike, en échange de son engagement d’approvisionnement exclusif. La Cour de cassation, a cependant estimé que ce crédit-fournisseur ne consistait ni en un délai de paiement ni en une avance de paiement, qui demeurent autorisés, mais en une véritable opération de crédit. D’après la Cour, le fait qu’un tel prêt soit considéré par les parties comme un engagement en vertu du contrat commercial est indifférent au caractère illégal de ce type d’opération, dont le monopole est accordé aux seuls établissements de crédit. Il est à noter que pour en arriver à une telle conclusion, la Cour a notamment pris en considération le fait que la société Fuchs consentait régulièrement de tels crédits-fournisseurs à ses clients. Le prêt n’a cependant pas été annulé, car l’article L511-5 du Code monétaire et financier ne prévoit pas une telle sanction. Cependant, les franchiseurs ou fournisseurs qui octroient de tels crédits illégaux pourraient se voir reprocher un acte de concurrence déloyale par leurs concurrents, parce qu’ils procurent ainsi un avantage illégitime à leurs franchisés ou distributeurs. Cass. Com 15 juin 2022, n°20-22.160 Notre conseil : Le franchiseur devra soigneusement éviter de consentir régulièrement à ses partenaires commerciaux des avances de trésorerie, au risque de s’exposer à une requalification en opérations de crédit, sanctionnées pénalement, et au titre desquelles un concurrent pourrait y voir un acte de concurrence déloyale.