Le manquement du Franchiseur à son obligation de remettre un document d’information précontractuel est-il automatiquement sanctionné par la nullité du contrat et sa condamnation à verser au Franchisé des dommages et intérêts ?

04 septembre 2018 • franchise


Aux termes de l’article L 330-3 du Code de commerce, disposition d’ordre public, « toute personne qui met à la disposition d’une autre personne, un nom commercial, une marque ou une enseigne, en exigeant d’elle un engagement d’exclusivité ou de quasi exclusivité pour l’exercice de son activité, est tenue, préalablement à la signature de tout contrat conclu dans l’intérêt commun des deux parties, de fournir à l’autre partie un document donnant des informations sincères, qui lui permettent de s’engager en connaissance de cause ». Compte tenu qu’il s’agit d’une disposition d’ordre public, le seul défaut de remise de ce document d’information précontractuel par le franchiseur pourrait être considéré comme devant entrainer la nullité du contrat conclu et l’indemnisation des préjudices subis consécutifs. Toutefois, la jurisprudence ne le décide pas ainsi : encore faut-il que le non-respect de cette obligation par le franchiseur ait vicié le consentement du franchisé, qui, s’il avait eu les informations sincères, ne se serait en conséquence pas engagé dans la franchise. Voici l’illustration de deux décisions divergentes : Ø  Ainsi, dans un arrêt rendu par la Cour d’appel de PARIS en date du 06 juin 2018, le franchisé de la marque ESPRIT reprochait au franchiseur de ne pas lui avoir remis le DIP lors du renouvellement de con contrat, afin de lui dissimuler la dégradation de son réseau. La Cour le déboute, considérant que ce dernier ne rapporte pas la preuve du vice du consentement. Les Juges retiennent en effet que le plan de sauvegarde de l’emploi mis en place par le franchiseur, avait fait l’objet d’une large publicité et ceci trois ans après la conclusion du contrat. La Cour considère alors que le franchisé ne pouvait dès lors prétendre ne pas en avoir eu connaissance. La Cour devait noter que le franchisé reconnaissait avoir disposé d’informations sur l’état du réseau ESPRIT lors de la conclusion de son premier contrat intitulé « Concession d’enseigne », la société ESPRIT s’étant abstenue en revanche de lui communiquer les informations actualisées pour le renouvellement et la signature d’un nouveau contrat intitulé « Contrat de franchise ». Ø  En revanche,  dans un arrêt du 13 juin 2018, la Cour de cassation a validé la décision de la Cour d’appel de PARIS d’avoir prononcé la nullité du contrat de franchise du fait de la violation par le franchiseur de son obligation d’information à l’égard de son futur franchisé. La Cour d’appel de PARIS avait ainsi jugé que le DIP ne contenait pas de présentation du réseau des affiliés de la société GUINOT, ni alerté sur la faible rentabilité des sites pilotes. La Cour relève en outre que le DIP ne mentionnait pas la présence de quatre instituts bénéficiaires des mêmes services,  sur la zone de chalandise du franchisé, la société GUINOT ayant volontairement dissimulé ces informations. Le dol est ainsi retenu et le contrat de franchise annulé. Encore une fois, le franchiseur ne saurait être qu’extrêmement prudent dans la remise de ce document d’information précontractuel, à l’égard de son franchisé et des informations qu’il contient. Cour d’appel de PARIS Pôle 5, chambre 4, 06 juin 2018, n° 16/10621 Cour de cassation, chambre commerciale, 13 juin 2018, n° 17-10618