L'éternelle question de la réception tacite

21 janvier 2018 • franchise


En raison de dommages consécutifs à la sécheresse, des époux ont déclaré un sinistre à leur assureur multirisques habitation, qui a mandaté un expert, lequel a fait procéder à une étude de sol. Le rapport géotechnique a préconisé un confortement. Un protocole transactionnel d’indemnisation a été conclu entre les époux et leur assureur. Des travaux ont été réalisés mais les assurés ont refusé de verser le solde en raison de leur mauvaise qualité. Un deuxième protocole a été signé avec l'entreprise ayant réalisé les travaux, aux termes duquel cette dernière s’engageait à reprendre les travaux mais ces derniers n’ont pas été terminés. Aussi, les assurés l’ont assigné en paiement de sommes ainsi que son assureur, le maître d’œuvre, l’expert et son assureur. La cour d’appel écarte la réception tacite des travaux que l'entreprise opposait aux demandeurs, aux motifs que les travaux n’avaient pas été réglés et que le maître de l’ouvrage avait contesté les travaux de reprise en introduisant une procédure de référé-expertise. Dès lors, elle met hors de cause les assureurs de garantie décennale et condamne in solidum le maître d’œuvre et l'entreprise ayant réalisé les travaux à indemniser les maîtres de l’ouvrage. L'entreprise s'est pourvue en cassation. Elle soutenait une contradiction des motifs équivalant à une absence de motifs. La cour d’appel se serait contredite en excluant la réception tacite pour absence de règlement des travaux alors qu’elle rappelait par ailleurs que les maîtres de l’ouvrage reconnaissaient avoir payé l’intégralité des prestations. Elle faisait valoir que la réception peut être tacite dès lors que n’est pas exprimée l’intention de refuser l’ouvrage dans l’état où il se trouve. Il en irait ainsi lorsqu’il y a à la fois prise de possession des lieux et paiement intégral du prix sans qu’aucune contestation ne soit immédiatement élevée. La Cour de cassation rejette ce pourvoi. Elle reprend à son compte le raisonnement d’appel qui a constaté « qu’il ressortait des pièces du dossier que, dès l’origine des travaux de confortement, (les maîtres de l’ouvrage) avaient contesté la qualité des travaux réalisés par la (requérante) et qu’ils avaient également contesté les seconds travaux de reprise ». Par conséquent, la cour d’appel a pu en déduire que la volonté non équivoque des assurés de recevoir les travaux n’était pas établie. La prise de possession des lieux n'est donc pas déterminante et ne suffit pas toujours à établir la volonté non équivoque d’accepter les travaux. Cassation 3e chambre Civile 14 décembre 2017 16-24752